vendredi 1 novembre 2013

Vivre la Semaine québécoise de réduction des déchets

Au Québec, 13 millions de tonnes de déchets sont produites chaque année, ce qui classe les Québécois et Québécoises parmi les plus gros producteurs de déchets par personne au monde. La production de déchets au Québec équivaut à un camion de 25 tonnes par minute.

C'est pourquoi, depuis plus de dix ans, la Semaine québécoise de réduction des déchets fait la promotion auprès des Québécois et Québécoises de l’approche 3R (Réduction, Réemploi, Recyclage/Compostage) et plus particulièrement les gestes de réduction et de réemploi pour gérer de manière écologique, économique, locale et démocratique nos déchets-ressources. Cette année, nous pouvions retrouver à la programmation : conférences, expositions, porte ouverte, actions de sensibilisation… Nous avons eu la chance, au cours de cette semaine, de participer, dans un premier temps, à la visite de l’incinérateur de Québec et, dans un second temps, à la conférence-midi L’emballage, nécessaire ou superflu? Voici ce que nous avons retenu. 
Visite de l’incinérateur à Québec
L’incinérateur reçoit annuellement environ 300 000 tonnes de déchets en provenance de la ville de Québec et des municipalités régionales de comté voisines. De plus, nous avons découvert que les boues des deux stations de traitement des eaux usées y étaient aussi acheminées pour y être déshydratées, séchées et incinérées, ce qui représente 18 000 tonnes de boues par année et pas moins de 400 000 $ de coûts de traitement!
Voici les différentes étapes de traitement.

Dans un premier temps, les camions de la collecte des déchets ultimes déversent leur cargaison dans la fosse à déchets. Depuis la salle de contrôle, le contenu de la fosse est homogénéisé à l’aide d’un grappin pouvant déplacer 5 tonnes de matière à la fois.  Puis, à l’aide d’un pont roulant, les ordures ménagères sont ensuite placées dans les entrées des quatre fours (chaudières) pour y être incinérées.

Étonnamment, l’inflammation des matières ne nécessite aucun combustible supplémentaire. Seule la répartition de matières humides est à surveiller pour permettre la combustion la plus complète possible. La chaleur (~1000 °C) produite par la chambre de combustion est utilisée à sa sortie en partie pour le séchage des boues; l'autre partie est convertie en vapeur. Ce ne sont pas moins de 810 000 tonnes de vapeur qui sont ainsi produites par l’incinération des déchets. Une partie de celles-ci est vendue à la papetière Papiers White Birch, située à proximité.
La combustion des déchets ultimes génère aussi des fumées qui sont traitées tout au long de leur parcours par des dispositifs antipollution et de deux produits réactifs : électrofiltres, dépoussiéreurs à manches, chaux hydratée et charbon actif.
La composition des fumées sortantes est contrôlée en continu. On y retrouve principalement O2, CO, CO2 et HCl. Le traitement des fumées produit 11 000 tonnes de résidus solides par année qui sont acheminés vers des lieux d’enfouissement sécuritaires et autorisés.
L’incinération des ordures et des boues produit 90 000 tonnes de cendres et de résidus qui n’ont pas brûlé aussi appelés « mâchefers ». Ces résidus sont envoyés à Lévis pour en extraire les métaux. Le reste sera acheminé vers le lieu d’enfouissement technique de Saint-Joachim.
Il existe un comité de vigilance depuis 2004, composé de gens demeurant dans le voisinage de l’incinérateur, de représentants des groupes environnementaux et socio-économiques ainsi que des représentants du milieu municipal. Le comité a pour objectif de maintenir les nuisances de l'incinérateur à son minimum.

Le coût annuel du fonctionnement de l’incinérateur atteint 26 M$, soit un coût de traitement de quasiment 100 $ par tonne de déchets, de quoi se motiver pour réduire la quantité de matières en supprimant des bacs à ordures les déchets qui n’en sont pas, comme les matières organiques qui peuvent être valorisées de différentes façons. Nous vous donnerons quelques pistes de réflexion en fin d’article.
 
Conférence-midi : L’emballage, nécessaire ou superflu?
L’emballage a plusieurs rôles. Les principaux sont la protection, l’information et le transport. S’en départir semble difficile. Alors, quelles solutions apporter?
La conférence-midi a été présentée par Édouard Clément, directeur général de Quantis, et Islem Yezza, directeur technique chez Cascades. Elle avait pour but de nous faire réfléchir au développement d'un produit dans sa globalité, de son projet jusqu’à sa mise sur le marché. Ce qui est le plus visible pour le consommateur est, bien sûr, l’emballage ménager que l’on doit évidemment gérer après son utilisation. Par contre, nous avons découvert que la fin de vie de l'emballage n'est pas toujours la plus problématique dans le cycle de vie du produit, mais plutôt la création de celui-ci. Le cycle de vie d’un produit se décompose en plusieurs étapes :
·       Extraction des matières
·       Fabrication
·       Transport et distribution
·       Utilisation
·       Gestion en fin de vie (qui comprend l’emballage)
En effet, on pourrait penser à première vue qu’utiliser du maïs soufflé pour protéger/emballer un objet a beaucoup moins d’impact sur l’environnement que du polystyrène. Ce n’est pas totalement vrai, car il faut prendre en compte le cycle de vie en entier. Si l'on additionne l’eau nécessaire à la culture du blé d'Inde, la récolte, le transport, l’énergie déployée pour la transformation en maïs soufflé, en plus de la dimension éthique d’utiliser de la nourriture comme emballage, au final, on observe une empreinte équivalente à celle du polystyrène. Cela fait réfléchir quant à nos choix en tant que consommateur.
Une étude de cas a été présentée sur l’exemple de l’emballage de courgettes dans un contenant en styromousse. Lui aussi paraît, à première vue, avoir plus d’impact que les mêmes courgettes non emballées et disponibles en vrac. En revanche, si l’on observe plus de 3 % de pertes de matières premières (courgettes abîmées lors de la manipulation, du transport et du stockage), l’empreinte écologique est plus importante que l’emballage individuel en barquettes de mousse de polystyrène.
C’est pourquoi les pistes pour optimiser l’emballage pourraient être les suivantes :
  • Supprimer le suremballage;
  • Eco-concevoir, par exemple, un film plastique adapté au contact avec l’aliment, facilement séparable d’un emballage cartonné contenant les informations sur le produit et le visuel marketing;
  • Utiliser de nouvelles matières comme un emballage écologique à base de champignons;
  • Repenser le design d’un emballage afin de limiter le nombre de palettes de transport.
Pour aller plus loin dans la réflexion de diminution des déchets à la source et pour revenir sur l’actualité qui nous concerne, nous vous proposons d’en apprendre un peu plus sur la valorisation des matières organiques que sont les restes alimentaires, les déchets végétaux et d’autres matières compostables.

Valorisation de nos matières organiques
Pour la ville de Québec, nous avons observé, entre 2002 et 2011, une augmentation de 62 % de la quantité de matières destinées à l’incinérateur, alors qu’en proportion, la population n’a augmenté que de 8 %. Sachant que 44 % des matières qui se retrouvent à l’incinérateur sont des matières organiques, chaque foyer peut facilement réduire ses déchets en mettant en place du compost individuel, ou en utilisant les centres de compostage communautaire disponibles à Québec.
De plus, un projet de récupération de l’énergie par biométhanisation est en cours. La biométhanisation est un procédé naturel basé sur la dégradation par des micro-organismes de la matière organique en l'absence d'oxygène. Ce processus se fait dans un centre de valorisation où l’on traite les matières organiques comme une ressource plutôt qu’un déchet. On obtient de cette dégradation la production de digestat qui sert principalement à enrichir les terres agricoles, et du biogaz qui s'apparente au gaz naturel et peut être utilisé de la même façon : combustion pour la production d'électricité ou de chaleur, production d'un carburant pour les véhicules, etc.
Autrement dit, les résidus organiques sont une véritable ressource énergétique, tant pour nos usages quotidiens que pour nos terres agricoles. 
Sur le papier, la mise en place de ce procédé semble incontournable. Or, les retombées économiques par rapport aux coûts engendrés ont récemment été remises en cause par une étude. L’organisme montréalais spécialisé en recherche économique conclut que « la voie de la biométhanisation apparaît comme des plus hasardeuses. Le potentiel de revenus est extrêmement bas et ne justifie guère l’investissement requis ».
Selon les calculs de l’IREC, les usines de biométhanisation sont de futurs « éléphants blancs ». Pour Montréal, le coût des infrastructures fera que chaque tonne traitée coûtera 1 228 $ (contre 60 $ par tonne pour l’enfouissement et 100 $ par tonne pour l’incinération). En contrepartie, les revenus qui seront obtenus tourneront autour de 9 $ la tonne. « Les revenus ne seront pas suffisants pour assurer la rentabilité des usines. C’est une technologie assez séduisante, mais le coût pour les contribuables serait exorbitant », indique Robert Laplante, coauteur de l’étude intitulée Du flou dans les calculs, de l’eau dans le gaz.


Ce à quoi la présidente du comité exécutif et élue responsable de l’environnement a répondu : « Ce n’est pas vrai qu’on n’a pas fait nos devoirs. On travaille sur la question avec nos partenaires depuis 2008 et on a visité plusieurs usines en Ontario. » Un avis partagé par la Ville qui convient que la biométhanisation est un procédé onéreux, mais qui permettra à terme de combler 16 % des besoins de gaz naturel de la ville.


En attendant une solution globale, chaque personne peut agir localement en minimisant ses déchets organiques au maximum.

En bref,
Le levier d'action principal du consommateur est de recycler pour diminuer son empreinte. Pour plus d'information sur les bons gestes à adopter, la Ville de Québec met à la disposition des citoyens et citoyennes une nouvelle édition de son Guide du tri.
Cette semaine de la réduction des déchets nous a permis une fois de plus de nous poser les bonnes questions et d'agir en appliquant la démarche 3RV.

Ève Le Luyer adjointe chez Écologistik

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