vendredi 21 juin 2013

Manger local : une culture de changement


Le marché alimentaire étant ce qu’il est devenu, c’est-à-dire ouvert sur le monde, on peut maintenant se régaler de fraises à l’année. Ail de Chine, bananes du Costa Rica et viandes des États-Unis font bel et bien partie de notre quotidien. Plus besoin de suivre les saisons et d’attendre pour manger ce que l’on désire! Est-ce une bonne chose? Alors que certains se réjouissent de la disponibilité des aliments à l’année longue, d’autres s’interrogent sérieusement sur les conséquences sociales, environnementales et économiques de cette concurrence alimentaire mondiale. Sachant que l’assiette des Québécois est composée seulement de 33% de produits issus de l’agriculture d’ici (contrairement à 78% il y a 25 ans), il y a peut-être lieu de s’inquiéter. Dans ce contexte, plusieurs affirment que la société devrait se tourner vers l’alimentation locale. Coup de marketing ou un réel changement prometteur ?

Manger local, c’est quoi ?

     Sans surprise, manger local signifie consommer des produits ayant parcouru le moins de kilomètres possible pour se rendre jusque dans notre assiette. Cela comprend les bons légumes de votre propre potager ainsi que les achats de produits régionaux ou provenant du Québec dans son ensemble.

Pourquoi préférer le local ?

Pour le goût. En tant qu’individu ou organisateurs d’événements, ce que l’on recherche avant tout, c’est la qualité et la fraîcheur de nos aliments. On veut avoir du plaisir à manger sainement! Ça tombe bien, car l’alimentation locale nous procure des aliments savoureux d’une grande qualité. Ils sont aussi plus nutritifs puisque cueillis à maturité et qu’ils ont passé un temps limité dans les transports. Avouez qu’aucune fraise importée n’arrive au pédoncule des fraises juteuses et sucrées du Québec!

Pour notre environnement. Selon le Ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ) et Statistiques Canada, il faut en moyenne 2500 km pour qu’un aliment se retrouve sur nos tablettes! Consommer local est donc un bon moyen de diminuer les kilomètres parcourus tout en minimisant les émissions de gaz à effet de serre (GES). L’entreposage et la commercialisation demandent aussi moins d’énergie. De plus, les aliments locaux nécessitent moins d’emballage pour arriver à notre assiette. Considérant que chaque Québécois produit environ 400 kg de déchets par an [1], cet impact n’est pas à négliger. Autre point important : cultiver des légumes « hors-saison » en hiver au Québec, même s’ils sont produits localement, demande beaucoup plus d’énergie que de les cultiver sur nos terres en saison. Manger local, c’est donc aussi se reconnecter avec la nature et avec le temps qui passe. C’est respecter le cycle des saisons. Équiterre met d’ailleurs à notre disposition un calendrier des récoltes [2] afin de nous aider dans nos achats responsables. Bref, manger local est un moyen efficace de diminuer la pression exercée sur la nature par notre consommation et donc de réduire notre empreinte écologique !

Pour notre communauté. Les impacts sociaux sont également nombreux. Puisque les produits locaux se font relativement discrets chez les grandes chaînes alimentaires, consommer local nous pousse souvent à entrer en contact direct avec les producteurs. Un lien de confiance se crée alors entre nous et ces travailleurs de la terre. Le consommateur s’attache ainsi davantage à sa communauté. Cette proximité permet également d’avoir un impact réel sur la production des aliments. Comment ? En l’absence d’intermédiaire, nous pouvons poser des questions directement aux producteurs, faire des commentaires sur les aliments, leur dire ce que nous apprécions le plus et ainsi influencer la production.

Pour notre économie. Sans surprise, l’alimentation locale amène également son lot de bénéfices économiques. Le marché mondial mine les secteurs locaux en les soumettant à une concurrence féroce. Par nos achats responsables, on investit dans notre communauté et on contribue à l’essor économique de la région. Du même coup, on participe à la création d’emplois. Le MAPAQ affirme d’ailleurs que « si chaque consommateur ajoutait seulement pour trente dollars par année d’aliments québécois à son panier d’épicerie, ce geste entraînerait une augmentation de plus d’un milliard de dollars des ventes de produits alimentaires du Québec en cinq ans ».[3] De quoi dynamiser l’économie locale ! 

Pour notre sécurité alimentaire. La sécurité alimentaire fait référence à « la disponibilité et à l’accessibilité des aliments de qualité et en quantité suffisante pour une population donnée ».[4] Assurer notre sécurité par l’accroissement de notre autonomie alimentaire apparaît de plus en plus comme une nécessité. La production locale peut nous aider face à l’incertitude des marchés internationaux, à la hausse des prix des denrées alimentaires, aux problèmes liés à l’industrialisation de l’agriculture et aux dangers de notre dépendance aux exportations. Dans une plus large mesure, la souveraineté alimentaire, c’est-à-dire le droit d’un État de définir sa propre politique agricole et alimentaire, semble également être nécessaire afin d’assurer notre sécurité alimentaire. Le MAPAQ a d’ailleurs récemment dévoilé sa nouvelle politique de souveraineté alimentaire qui privilégie entre autre la production locale.[5] Curieux d’en connaître plus sur ce sujet? Plusieurs sites existent dont celui de la Coalition souveraineté alimentaire, du MAPAQ et de l’Union des producteurs agricoles (UPA).

Sensibilisation à l’alimentation locale : des initiatives importantes.

       Ça y est, vous êtes décidé ! Vous tenez à vous procurer davantage de produits locaux, pour votre famille et vos événements. Voici une liste non exhaustive d’idées et de ressources pour y arriver. 

     L’agriculture urbaine [6], c’est-à-dire la culture de plantes ou l’élevage d’animaux en ville est une avenue intéressante. Potagers personnels, jardins collectifs et communautaires, fermes sur les toits sont de plus en plus accessibles. Mettez la main à la terre! Vous pouvez aussi tenter de privilégier les circuits courts de commercialisation alimentaire [7] et l’agriculture soutenue par la communauté.[8] Marchés publics, fermiers de famille, ventes à la ferme et marchés virtuels tel l’ÉcoMarché de solidarité régionale sont quelques exemples d’initiatives qui réduisent le nombre d’intermédiaires entre vous et votre festin. Plusieurs coopératives, restaurants et épiceries vous offrent également des produits locaux. Pour vous y retrouver, Équiterre met à votre disposition un répertoire d’endroits mettant en vedette les produits bien de chez nous. Le web documentaire « Épluche ta ville » est également une ressource inspirante pour les consommateurs de la métropole. Les Aliments du Québec vous offre aussi un répertoire de produits de notre belle province.

En bref!
         
L’agriculture fait face à des défis de taille. L’alimentation locale semble être un moyen efficace pour assurer la pérennité de cette industrie tout en respectant l’environnement, en  améliorant notre relation avec la nature et nos producteurs d’ici, et en contribuant à l’essor de notre économie. Heureusement, le changement de culture s’accélère de plus en plus grâce aux initiatives de gens soucieux de notre avenir. L’alimentation locale est un premier pas nécessaire vers une consommation responsable globale. Mangeons local, et pourquoi pas aussi équitable et bio.

Bon appétit! 


Anne-Sophie Gousse-Lessard pour Écologistik

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